Note du test 8/10En conclusion :

Un jeu tout aussi difficile à vous décrire qu’il ne l’est à appréhender et, probablement, à concevoir. Mais quel tour de force! L’entrée en matière est certes douloureuse mais sous une couche de frustration dévale un torrent de bonnes intentions, brillamment mises en forme. Poussant la survie jusqu’au bout des ongles en vous faisant incarner des élèves totalement ignorants, Ancestors: The Humankind Odyssey comprend que la patience est une vertu qui ne demande qu’à être récompensée et chérie tandis que l’observation est un travail de forçat pour tromper le trépas, orgueilleux dictateur de cette période où la ruse et la force étaient les rudiments indispensables pour perdurer. De la découverte à l’appropriation, en passant par la peur ou la témérité, il n’y a pas un instant où le soft ne maquille pas son schéma quelque peu redondant avec élégance. De là à convaincre les joueurs grégaires? Absolument pas car en dépit d’une générosité réfléchie, le soft abandonne en pleine nature les guerriers qui contestent la nécessité d’afficher une persévérance sans faille et qui se comportent en ennemis des fanatiques de l’exigence parfois un chouia trop importante. Qu’importe! Car l’expérience est unique, et l’UFO n’est pas un secret gardé en zone cachée. Doit-on y voir plusieurs analogies avec notre angoisse de la fin de notre monde? Ne nous laissons pas tenter par l’affirmative...

Les plus

Novateur
Cohérent
Un monde naissant en adéquation avec son propos
La Direction Artistique globale
Mécanismes riches…

Les moins

...qui peuvent rebuter au premier contact
Quelques loupés de gameplay
Un investissement important pour être apprécié

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    rédacteur
    NoBloodyKnows


  • ps4

    Ancestors : The Humankind Odyssey
    Editeur : Panache Digital Games
    Développeur : Private Division
    Genre : Action | Aventure
    Etat du jeu : Jeu disponible
    Date de sortie : 06 Décembre 2019
    Trophées : Oui
    Support


    version éditeur

    Test Ancestors : The Humankind Odyssey

    Publié le Mardi 10 Décembre 2019 à 20:41 par NoBloodyKnows
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    “Non mais tu veux qu’on te dise quoi bon sang?! Des primates, voilà tout! Avec des puces, des poils, et une grande bouche! Tu as déjà vu la gamelle d’un anthropoïde, non? C’est vrai que c’est impressionnant! Mais sans déconner tu désires qu’on fasse quoi? Qu’on se gratte les fesses contre un arbre? Puis on n’a plus de jeux de mots concernant les singes!”. Voilà en substance la réponse de votre duo déjanté lorsque Pilou, notre rédacteur en chef un brin farfelu, nous a demandé où en était le test de Ancestors. Car aujourd’hui chers amis, nous allons nous arrêter sur l'inénarrable, l’inexplicable irascible inconnu qui est le fond de l’oeuvre imaginée par l’équipe de Patrice Désilets. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que c’est un filou le Patounet. Connu pour son boulot chez Ubisoft pour Prince of Persia: Les Sables du Temps, ce dernier a endossé un rôle prépondérant dans la conception de ce qui deviendra à l’usure une série indissociable du pays vidéoludique: Assassin’s Creed. Mais cela ne lui suffit pas à Patoche. Après un imbroglio assez saisissant, le voilà parti fonder son propre studio, Panache Digital Games, avec des ambitions qui peuvent paraître démesurées mais qui prouvent qu’on peut être moins gros que le boeuf tout en ayant une ambition magistrale. De quoi faire fantasmer et titiller la curiosité du NBK, toujours prompt à de nouvelles expériences. Et que ce soit volontaire ou non pour expliquer le développement d’une lignée, l’opus est tout simplement un OVNI.

     

    Le Néant détale


    Soyons honnêtes, comme de coutume, avec vous: si les théories/découvertes/présomptions de l’évolution jusqu’à l’arrivée de l’Homme sont pour vous une totale hérésie, vous ferez ici une multitude de crises. On remballe tout, “avant nous”, 10 millions d’années avant celui dont la naissance est encore fêtée de nos jours. Vous dirigez chaque hominidé d’un clan et franchement, au niveau de la chaîne alimentaire, nous sommes plutôt en bas. L’intro ne fera que vous le rappeler, et le premier défi consiste à vous mettre dans la peau d’un petit désoeuvré et perdu au milieu de la végétation intense, en proie à une peur des plus graphiques.

    En effet, après nous avoir expliqué que l’aide ne sera pas énorme, nous serons jetés dans l’obscurantisme des mécaniques qui sont expliquées à minima. Si cela est plus clair, selon certains retours,en adoptant l’équation avec la version PC, ce ne sera pas non plus un florilège de compréhension. A croire qu’en prenant de l’indépendance, c’est un anti-Assassin’s Creed qui se produit: être guidé, c’est obsolète!

    C’est assez simple en soi: Ancestors laissera beaucoup de monde sur le carreau car il est si cryptique qu’il découragera bon nombre de gamers, vexés d’être ensevelis sous une pile d’informations qui engendrent une richesse sous laquelle on croule. Les indices sont maigres, et l’apéritif d’accueil chiche. Rien n’est évident, rien ne vous est offert. C’est un choix risqué de la part des créateurs, mais vous ne disposerez d’aucun vrai tutoriel: tout juste vous contenterez vous d’explications nébuleuses, uniquement après avoir “tenté un truc”. Le plausible problème est que nous préférons la jouer safe de prime abord mais même ça, on ne sait pas comment faire. Même Demon’s Souls fut beaucoup plus explicite à l’époque, c’est dire!

    Comment ça? C’est terrible à ce point? Diantre non camarades! Ce qui peut sembler rédhibitoire pour tant d’autres productions n’est ici qu’une logique quasi-réaliste. Pour une tribu, la vie est faite de dangers en tout genre, qu’ils soient matérialisés par des grosses bestioles ou par un état néfaste qui nous consume de l’intérieur.

    Pour subsister, il faut savoir s’adapter, grandir...et évoluer.

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    Il se passera du temps avant d'en arriver là!

    Humains sans bipède


    C’est le sel, le piment d’espelette ou l’épice que vous préférez: Ancestors poursuit son credo en tant que vrai jeu de survie où les “Premiers” furent contraints de sauver leurs miches en suivant un apprentissage de gestes qui nous paraissent si basiques aujourd’hui. Mais justement: c’est la base! Une fois votre clan de base réuni entièrement, vous allez devoir trouver comment boire, manger ou dormir. Sachant qu’au début, sans être trop téméraires (il nous a fallu 2 runs mal engagés pour le comprendre!), nous sommes à l’abri de l’extérieur et de ses vices, entourés de ressources abondantes pour s’en sortir.

    Vous comprendrez ainsi que vos primates sont des femelles ou des mâles, et que ce sont des enfants, adultes ou anciens. Et tous seront essentiels! Vous n’aimez pas les gosses dans le jeu vidéo? Sachez que sans eux, l’évolution sera minime car ils sont les vecteurs de la conservation de la connaissance. Y’en a marre des vieux? Ceux-ci sont plus faibles oui, mais ils gèrent leur peur (car passer en mode “hystérie” vous fera passer un pur moment de stress) par leur expérience tandis que les adultes sont plus robustes.

    Ce sera le dilemme de vos péripéties au sens où quand vous déciderez d’explorer, vous serez tous amenés à faire un choix: emmener un petit ou non, en gardant en tête le fait qu’ils sont capitaux pour l’intégration du savoir, incarner un adulte pour avoir plus de coffre ou prendre un vieillard, sachant que ces derniers sont un peu “la chair à canon”.

    Ben oui car une fois les apprentissages intégrés (comme d’hab, on y revient plus tard), vous choisirez d’évoluer pour vous retrouver 15 années plus tard (ce temps sera flexible mais si on vous explique exactement pourquoi, on vous éclate le plaisir de la découverte): les petits bouts de poils sont devenus grands, les grands des anciens et les anciens...ne respirent plus.

    C’est l’idée et nous ne sommes en aucun cas invités à se prendre d’affection pour un des membres du groupe (tous interchangeables selon une simple manip’!): c’est le collectif avant tout et puisque dehors, ça craint alors autant prendre ses dispositions pour se renforcer. De fait, l’accouplement entre un mâle et une femelle fertile est indispensable pour dissiper l’éphémère et trouver des garants de la race. On ne vous parle pas ici de la parade nuptiale pour que vous soyez un vert galant de premier choix. Pensez juste au “clic…”.

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    Le meilleur moyen d'éviter le danger!

    Label aux poils dormant


    Oui il faudra des successeurs mais pas n’importe comment, surtout en début de partie. Pour croître et développer son groupe, il faut que ce dernier soit conséquent. Et, originalité de la prose, il est indispensable d’avoir le maximum de bébés sinon votre arbre de compétences tombe un peu à plat lors d’un passage de génération. Appelé “système neuronal”, vous trouverez des attributs souvent régis par la répétition du geste qui vous donnent des êtres plus forts.
    En ce sens d’ailleurs, il vous sera essentiel de comprendre comment passer un objet d’une main à l’autre pour saisir le fonctionnement du crafting qui vous ouvre la voie du cassage de noix, de broyage de fleurs curatives ou de créations d’outils de pêche voire...d’armes de défense.

    Sauf que...une compétence n’est effective que pour une génération. A vous de la verrouiller pour plus tard, et cela est possible si vous possédez un enfant. Vous en avez 2? Deux compétences seront à disposition pour la génération suivante. Et ainsi de suite. Surveillez aussi les mutations spontanées mais chut! On ne vous a rien dit!

    D’accord sur le papier cela est frustrant mais des capacités découvertes ne sont pas perdues. Elles sont juste inactives le temps de remettre de l’expérience afin de les utiliser. Et comment engendre-t-on l’empirisme? Par la découverte. Par l’observation. Par la curiosité. Vous devrez tester tout et n’importe quoi et par pitié, ne vous laissez pas tenter par l'affront d’un quelconque tuto qui vous gâcherait l’essence de la découverte.
    Le jeu est conçu comme tel et les premières heures sont douloureuses, c’est un fait. Mais au fur et à mesure vous prendrez vos aises: si vous fuyez au premier abord face à un des cadors du superbe bestiaire, vous serez bien plus friands à vous la raconter quand les vôtres seront les alliés de votre meute, inversant le rôle du prédateur.

    Dommage que nous soyons obligés de composer avec un gameplay tiède concernant les combats, où l’esquive et contre-attaque sont simples à sortir mais bordéliques lorsque vous attaquez à plusieurs, entre gestion aléatoire de l’IA et caméra qui se foire de temps en temps, histoire d’ajouter une couche de graisse à une difficulté qui n’en demandait pas autant.

    D’ailleurs, sachez que tout se joue avec des interactions contextuelles voire, comme nous aimons les appeler sur PSMag, “des QTE inversés”. Un appui court ou maintenu, ce n’est pas exactement la même chose et vous serez vite punis d’une erreur engendrée par maladresse. Effectivement, entre appeler un seul voisin ou rameuter tout l’quartier, ce n’est pas exactement la même chose…
     

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    Rien n'est jamais vraiment calme...

    Gare aux morilles!


    Pourquoi visiter cet Open-World pernicieux alors? Car pour acquérir le savoir, il faut s’étendre. Ne plus être en reste. Puis...la comète. Dompter les zones jusqu’à les maîtriser: ce territoire est à vous et à personne d’autre. Le souci? Tout peut vous amener vers le repos éternel.

    Nous l’avons vu, il y a déjà “les autres”, beaucoup plus enclins à vous bouffer ou vous charger la tronche, voire vous mordre pour vous empoisonner. Mais les serpents ne sont pas seuls: ingérer un champignon vénéneux vous provoquera aussi bien des remous, tout comme boire de la flotte cradingue ou sauter un repas à défaut de le faire d’arbre en arbre. Ce dernier point aurait d’ailleurs pu être le petit nounours qui aurait mérité plus de câlins tellement le sentiment d’imprécision se dégage. Et se vautrer lamentablement au beau milieu de 2 jojos qui ne vous aiment pas, ça la fout mal! A moins qu’ils ne se déchirent entre eux…

    En tout cas saignements, squelette endommagé ou troubles de la vision issus du venin, tout a un remède qu’il convient d’identifier, ne serait-ce que visuellement pour anticiper une éventuelle retraite. Et si vous voulez éviter ces désagréments, tout comme une panique mécanique de votre avatar, à vous d’observer l’environnement et en déceler l’odeur ou le bruit pour mesurer chaque déplacement. Il faudra d’abord contourner la menace; néanmoins, nos descendants y reviendront peut-être pour l’éradiquer et faire payer les nombreuses morts qui arpentent votre chemin. Un lourd tribut qui peut agacer parfois et de cette rage se repentira la revanche lorsque votre progrès sur l’échelon social viendra pointer le bout de son nasique!

    Flipper c’est bien, mais vous apprendrez à tuer ou intimider pour éviter l’affrontement et développer votre rang de race qui devient de plus en plus dangereuse. L’union fait la force et la pointe transperce ce qui se dresse contre elle. Le leitmotiv reste certes identique tout au long du soft. Puis partez vers le haut si le plancher est trop rugueux!

    Une métaphore? Il n’y a qu’un pas.

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    Cela paraît poilant...c'est surtout indispensable!

     

    “On n’manque pas d’respect à Rhésus!”


    L’Afrique de nos premiers cafouillis est un prélude à notre mort et à notre existence. Bien des trouvailles de Ancestors rendent hommage à ce simple constat. Entre les animations à tomber, évitant généralement les bugs de collision, ou le design changeant de vos poilus, la Direction Artistique régale en évitant toute faute de mauvais goût de sagouin.

    Ok, la technique du flou pour masquer quelques textures primaires, voire baveuses, on ne nous l’a fait pas. Oui ce DL pour charger la carte (que nous n’avons pas dans les mains pour nous repérer, implacable cohérence) est assez long. C’est tout? A peu près. Visuellement ce n’est peut-être pas la Bérézina (géographie, quand tu nous lâches!) technique mais que ces couleurs sont percutantes! Sombres ou chatoyantes, jamais dans l’excès ou la saturation malvenue. Le temps défile avec un cycle jour/nuit sublimé par un contraste aussi percutant qu’évocateur.

    Coup de bambou: l’OST se fond avec l’ensemble. On regrette parfois sa répétitivité car le titre possède une durée de vie digne d’un J-RPG qui regorge de petites quêtes annexes et le nombre de pistes ne suffit jamais. Toutefois elle permet de poser une ambiance hors du commun en nuançant les percussions et les rythmes s’enchaînent avec une fluidité étonnante. Jusqu’à se faire oublier quand cela est nécessaire.

    Mieux, le sound design fait office de cas d’école à suivre avec attention, tellement le monde parfois un peu vide semble paradoxalement vivant, où les cris des singes ne paraissent pas ridicules. Du coup on ne se marre pas bêtement en jouant à Ancestors et la nécessité de gonfler à bloc sa perception nous tient perpétuellement en alerte.

    Plus de doute: nous savons pourquoi nous sommes là.
     

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    Un saut salvateur!

     

     




    Test Ancestors : The Humankind Odyssey - 9 minutes de lecture